Penchée
Je parle souvent d’éthique ici, et donc - sans doute - d’une certaine idée de la droiture.
Que ça soit bien clair ici: je penche, j’oscille, je tombe, très souvent. Mon éthique n’est pas un culte de la perfection, c’est une question sans cesse posée, une boussole interne pour les jours d’orage. Une conscience de soi vigilante et bienveillante, pour développer ce qu’on appelle en sanskrit upaya: le moyen habile, la méthode juste, la réponse appropriée, pour le bénéfice de tous les êtres.
Comme c’est vertigineux, c’est une pratique d’humilité.
Comme c’est impossible, c’est une pratique de l’échec.
Et comme c’est nécessaire, c’est une pratique de persévérance.
Il m’arrive d’être blessante. Je parle beaucoup, je n’écoute toujours pas assez et j’adore avoir raison. Je m’accroche à mes certitudes pour me rassurer, comme tout le monde. J’ai mis des années à apprendre à être dans ma vie sans me noyer dans la fête. J’ouvre insta toutes les 5 min en regardant une série parce que why not.
Mais je dois aussi à ma pratique mon immense envie de participer, et tout ce qui (re)donne du coeur à ma vie.
Une ou deux fois, j’ai mentionné à mes élèves que je vivais un épisode de stress ou d’insomnie. J’ai été frappée par leurs réponses et leur remerciements. Comme si c’était une immense surprise, comme si ça les soulageait profondément de savoir que leur prof n’était pas une super performeuse du bien-être. Comme si malgré moi, ma pudeur à ne pas raconter ma vie en cours avait été comme un mensonge par omission.
Cette image lisse qui circule sur les réseaux et que nous créons à coup de photos de postures et de conseils bien-être, avec les meilleurs intentions, contribue souvent malgré nous à construire un idéal individualiste et mensonger, étrangement coupé du monde et de ses réalités. Elle crée des figures d’autorités excluantes et intimidantes, un dogme du vieux monde que nous avons besoin de déconstruire.
Faisons de notre éthique une pratique de liberté et de communauté.
Ami.e.s élèves camarades, penchons 🖤